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Europe : la parole aux peuples

Par PAUL ARIÈS Directeur du Sarkophage et rédacteur en chef de Zindigné-e-s ! ETIENNE BALIBAR Philosophe ALAIN CAILLÉ Sociologue THOMAS COUTROT Coprésident d’Attac PIERRE KHALFA Coprésident de la Fondation Copernic ARIANE MNOUCHKINE ArtisteDOMINIQUE MÉDA Sociologue PATRICK VIVERET Philosophe

La crise de l’euro risque de déboucher sur l’effondrement de la construction européenne. Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ont imposé un nouveau traité ou «Pacte budgétaire» dans l’espoir de rassurer les marchés financiers en instituant une «règle d’équilibre budgétaire» à caractère quasi constitutionnel. Mais, loin d’éloigner le danger, ce traité va l’aggraver.

Il va en effet accélérer le processus de paupérisation aujourd’hui engagé, dont la Grèce est la pointe avancée. Avec la «troïka» (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international), les gouvernements ont choisi de réduire partout les dépenses publiques, de baisser les salaires et d’augmenter les impôts indirects qui pèsent surtout sur les revenus des classes populaires. Loin de conduire à une réduction des déficits, le Pacte budgétaire, en généralisant ces politiques dépressives menées simultanément dans toute l’Europe, va aggraver le chômage, la pauvreté, les difficultés de logement, le délabrement des services publics et in fine les déficits. En laissant aux marchés financiers le monopole du financement de ces déficits, le Pacte leur laisse également un pouvoir de chantage sans cesse accru. Le Pacte budgétaire portera enfin un rude coup à la perspective de la transition écologique. Celle-ci suppose en effet d’importants investissements publics, que l’austérité budgétaire, la récession et le dogmatisme de la Banque centrale européenne vont rendre durablement impossibles.

C’est aussi la démocratie qui est mise à mal par ce nouveau traité. Les technocrates de la Commission seront seuls maîtres du calcul de ce mystérieux «déficit structurel» - concept éminemment controversé chez les économistes - qui ne devra pas dépasser 0,5%. Les sanctions contre les pays contrevenants seront désormais quasi automatiques, coupant court  à tout débat. La Commission et tout Etat qui le souhaitera pourront traîner un autre Etat devant la Cour européenne de justice pour le contraindre à réduire plus vite ses déficits. La troïka pourra imposer ses «conditionnalités» à tout pays en difficulté et, comme en Grèce, au Portugal et en Espagne, réduire les salaires, institutionnaliser la précarité et abolir la négociation collective. Cette orientation inacceptable peut déboucher sur l’effondrement de l’Union européenne et le chacun pour soi. Pour notre part nous voulons une sortie par le haut : une Europe qui s’affranchirait de la tutelle des marchés financiers. Une Europe qui se doterait d’un vrai budget grâce à une fiscalité redistributive. Une Europe qui établirait des règles et un calendrier de convergence sociale vers le haut. Une Europe qui s’engagerait résolument dans la transition écologique en aidant les pays du Sud à faire de même. Une Europe où la démocratie retrouverait droit de cité au lieu d’être étouffée par l’impitoyable et absurde discipline des marchés.

Pour ouvrir cette perspective, il faut d’abord un mouvement de fond des sociétés européennes. Une puissante mobilisation citoyenne transeuropéenne pourrait résulter de la convergence des mobilisations syndicales, associatives, d’Indignés, d’audit citoyen des dettes publiques. La ratification du Pacte budgétaire doit intervenir avant la fin 2012. Elle peut et doit être l’occasion pour les peuples de s’emparer de ces questions et de décider directement. C’est pourquoi nous nous prononçons pour un référendum, partout où ce sera possible, sur les choix européens qui permettra de mener un débat approfondi, à commencer par la France. Il ne s’agit pas de rejouer le match de 2005 : la crise financière et celle de l’euro ont redistribué les cartes, comme en témoigne l’engagement, pour la première fois, de la Confédération européenne des syndicats contre un traité européen. Il s’agit plutôt de dire deux choses : non, nous n’acceptons pas ce Pacte budgétaire qui enfonce l’Europe dans son échec ; oui, nous voulons initier, avec les peuples européens qui le souhaitent, une construction alternative. Nous ne voulons pas du repli national ; mais nous n’acceptons pas non plus les abandons de souveraineté démocratique au bénéfice de la finance sous prétexte qu’ils serviraient le projet européen.

Au cas où la majorité issue des élections de mai et juin n’engagerait pas l’organisation de ce vaste débat démocratique dont la France et l’Europe ont tant besoin, nous prendrons l’initiative de proposer à la société civile d’organiser en France un référendum d’initiative citoyenne autour de ces questions. Pour que des millions de citoyens s’engagent avec nous dans ce débat et commencent à se réapproprier ensemble l’avenir de l’Europe.

 

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