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Taxes - Page 5

  • La "fraude fiscale la plus importante jamais enregistrée" épinglée par la Cour des comptes

    Dans Le Monde du 08 février 2012, article signé d'Hervé Kempf. (http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2012/article/2012/02/08/la-fraude-fiscale-la-plus-importante-jamais-enregistree-epinglee-par-la-cour-des-comptes_1640287_1471069.html#ens_id=1640229)

    La Cour des Comptes consacre un chapitre de son rapport public annuel 2012 à la"fraude à la TVA sur les quotas du carbone". Selon elle, cette escroquerie qui s'est déroulée en 2008 et 2009, "est la fraude fiscale la plus importante jamais enregistrée en France en un temps aussi bref". Elle en estime le montant à 1,6 milliards d'euros en perte fiscale pour l'Etat français. Quand un coup d'arrêt lui a été donné en juin 2009, les fraudeurs se sont déplacés dans les autres Etats, qui ont réagi plus tardivement.

    La Cour rappelle que, selon Europol, la fraude a coûté 5 milliards d'euros à l'ensemble des Etats de l'Union. La Cour décrit le mécanisme de la fraude, qui s'est déroulée sur le marché européen du carbone. Celui-ci, appelé ETS (EmissionsTrading Scheme), organise les échanges entre les entreprises qui dépassent un plafond, fixé par les autorités, d'émissions de gaz à effet de serre, et les entreprises qui sont en-dessous de ce plafond. Les fraudeurs ont appliqué un système dit du "carrousel" : des sociétés, souvent créées pour l'occasion, achetaient hors taxe des quotas de CO2 dans un Etat membre, les revendaient en France en facturant la TVA de 19,6 %, et disparaissaient sans payer la TVA à l'Etat français.

    AUCUN CONTRÔLE EXTERNE

    Les rapporteurs expliquent que l'ampleur de cette fraude a été facilitée par les "trois failles originelles" du marché européen du carbone : le régime de la perception de la TVA n'avait pas été sécurisé, l'accès au marché était extrêmement simple et peu contrôlé, le marché lui-même n'était soumis à aucun contrôle externe.

    Les rapporteurs critiquent pour leur négligence et leur lenteur à réagir les intervenants institutionnels sur ce marché : la filiale spécialisée de la Caisse des dépôts et consignations (CDC Climat), sa filiale Bluenext, plateforme boursière du marché, l'administration fiscale, et enfin le système Tracfin de lutte contre le blanchiment. Sa principale recommandation est d'accélérer les délais entre la déclaration de soupçons auprès de Tracfin et l'engagement de mesures effectives.

    Un soulagement, au final : les leçons ont été tirées de cette fraude et, en principe, elle n'est plus transposable sur les marchés comparables de l'électricité et du gaz.

    Hervé Kempf

  • TVA=13, TTF=1 : les mauvais comptes du président-candidat

    Logo Attac.jpgNicolas Sarkozy a tranché : avec la hausse prévue de la TVA, les patrons verront leurs coûts salariaux diminuer de 13 milliards d'euros. En revanche, la fameuse taxe Tobin à la française ne rapporterait qu'1 milliard d'euros. Même en y ajoutant la hausse de la CSG sur les revenus du capital (qui devrait rapporter moins de 2 milliards), le compte n'est pas bon pour la justice fiscale.

    En effet qui va payer la hausse de la TVA ? Pour l'essentiel, les consommateurs. Certes, le candidat-président s'est dit « prêt à prendre tous les paris » qu'il n'y aurait pas de hausses de prix. Malheureusement, il est vraisemblable que les entreprises en profitent pour améliorer leurs marges en ne baissant pas les prix hors taxes. Telle est sans doute l'intention des chefs d'entreprise ou du Medef, qui réclament depuis bien longtemps cette mesure à cor et à cri. 
    La TVA « sociale » réduira donc la consommation et aggravera la récession dans laquelle la France est engagée depuis quelques mois. C'est la première raison de la rejeter. La deuxième tient à son injustice : en augmentant la TVA, on réduit encore la progressivité du système fiscal. Car la TVA pèse plus lourdement sur les ménages populaires, qui consomment tout leur revenu, que sur les ménages aisés qui en épargnent une bonne partie. 

    Cette stratégie de TVA « sociale » s'inscrit dans la logique de dumping social et fiscal  caractéristique de l'Union européenne et de la mondialisation néolibérale : or c'est précisément la course vers le bas des coûts salariaux qui entraîne l'Europe et son modèle social  vers le gouffre. La hausse de TVA, déjà pratiquée en Grèce, en Espagne, au Portugal, en Italie, n'est qu'un volet des plans d'austérité qui sont en train d'enfoncer l'Europe dans la dépression.
    Quant à la taxe sur les transactions financières, elle rapportera certes plus que le dérisoire impôt de Bourse, qu'avait supprimé le même Nicolas Sarkozy en 2008. Mais elle ne s'appliquera ni aux transactions sur les obligations, ni à celles sur les devises, et de façon marginale aux produits dérivés, qui sont surtout échangés à Londres et à Francfort. Le produit servira à combler les déficits et pas à financer les politiques de solidarité et de préservation de la planète : ce qui sera prélevé à la finance lui sera redistribué en intérêts de la dette publique. On est bien loin d'un projet crédible et efficace, qui suppose une  réelle volonté de désarmer la finance et de redistribuer les richesses.

    Attac France, le 30 janvier 2012

  • Taxe Tobin : l'initiative politicienne de Nicolas Sarkozy

    Taxer les transactions financières, Jean-Marie Harribey, ancien président d'Attac, est pour depuis des années. Il ne se réjouit pas pour autant que le président français défende subitement cette mesure. (http://leplus.nouvelobs.com/contribution/229620-taxe-tobin-l-initiative-politicienne-de-nicolas-sarkozy.html)

    Que Nicolas Sarkozy propose aujourd'hui l'instauration de la taxe Tobin marque son incompréhension totale de la crise que nous traversons depuis quatre ans et demi, ainsi que l'impasse dans laquelle il se trouve concernant les solutions à mettre en œuvre.

    Que les choses soient claires : Attac est favorable depuis 13 ans à l'instauration d'une taxe sur les transactions financières. Ce n'est pas maintenant que nous allons lâcher. Mais cette mesure doit s'inscrire dans un champ plus vaste et ne pas se limiter à une annonce politicienne comme celle que Nicolas Sarkozy nous présente.

    Une initiative politicienne

    Nous assistons à une volte-face sidérante du gouvernement sur la question de la taxation des transactions financières. Jamais un tel changement de position ne s'est opéré en si peu de temps. Il y a deux mois encore, la taxe Tobin était inefficace et impossible à mettre en place. Ce n'était pas franchement une nouveauté : depuis 10 ans, les gouvernements de droite mais également de gauche n'ont pas voulu de cette mesure - souvenons-nous du rapport remis à Dominique Strauss-Kahn en 1999, alors qu'il était ministre de l'Economie et des Finances, qui déglinguait complètement la taxe Tobin. Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy la défend comme si de rien n'était.

    Pourquoi une telle volte-face ? La raison est bien évidement politicienne, nul ne peut en douter à quatre mois de l'élection présidentielle et à cinq des législatives.

    Le bilan de Nicolas Sarkozy est exécrable : il a échoué sur tout (le pouvoir d'achat, l'emploi, la régulation de la finance, la taxe carbone, etc), excepté pour faire des cadeaux aux plus riches. Il lui faut donc occuper le terrain et comme il est malin, il a choisi une mesure qui recueille un écho relativement favorable dans l'opinion publique, compte tenu de la crise. Voilà pourquoi il opère ce revirement à 180 degrés, prenant de surcroît l'initiative d'agir seul au niveau européen.

    Mais il ne faut pas se leurrer. Même si François Fillon présentait en février un projet de loi sur une taxation des transactions financières, il semble qu'elle ne porterait que sur les actions et non sur toutes les transactions financières, et elle ne pourrait être mise en œuvre avant la fin du mandat de Nicolas Sarkozy. C'est donc le président suivant qui en hériterait.


    Taxer oui, mais pas dans n'importe quel cadre

    L'idée d'une taxe Tobin fait son chemin. Depuis mars 2010, le Parlement européen a acté à trois reprises le principe d'une taxe sur les transactions financières. L'été dernier, la Commission européenne s'est elle aussi déclarée favorable à une telle mesure, à l'horizon 2014. En France, le Sénat a adopté, depuis qu'il est majoritairement à gauche, le projet d'une taxe de 0,05% visant l'ensemble des transactions à compter du 1er juillet 2012. Les choses restent néanmoins en suspens tant que l'Assemblée nationale est à droite.

    Mais il faut bien comprendre qu'Attac défend la taxe Tobin dans le cadre de mesures plus vastes, qui permettraient la mise au pas et le contrôle démocratique des activités bancaires, à savoir 

    -    Le contrôle de la banque centrale et la socialisation des banques.
    -    La séparation entre les banques de dépôts, qui financent l'économie, et les banques d'affaires, qui servent à la spéculation.
    -    La mise au ban des paradis fiscaux, notamment via l'interdiction des filiales de banques dans ces paradis

    C'est toujours dans cette même veine que nous menons campagne en ce moment - aux côtés d'autres associations, de syndicats et de certains partis politiques - pour réaliser un audit citoyen sur notre dette publique. Il s'agit de déterminer quelle part de cette dette - 1600 milliards d'euros au total ! - est illégitime, c'est-à-dire due aux allégements fiscaux et aux sauvetages en catastrophe des banques et non aux dépenses publiques.

  • Taxe Tobin : Attac et Nicolas Sarkozy, même combat ?

    Tel est le titre de ce "chat" organisé par le journal Le Monde avec le co-président d'Attac Thomas Coutrot, lundi 9 janvier. L'intégralité de l'échange avec les lecteurs du Monde sur le site : http://www.lemonde.fr/politique/chat/2012/01/09/taxe-tobin-attac-et-nicolas-sarkozy-meme-combat_1627266_823448.html  

    Que pensez-vous du projet de taxe sur la transaction financière (TTF) telle que Nicolas Sarkozy semble vouloir la proposer ?

    Thomas Coutrot : Ce projet semble se résumer au rétablissement de l'impôt de Bourse que le même Nicolas Sarkozy a supprimé au début de l'année 2008, quelques mois après son élection. Cette taxe frappait les transactions sur les actions à la Bourse de Paris à hauteur de 0,3 %. Elle a été supprimée soi-disant pour renforcer l'attractivité de la place de Paris.

    La taxe Tobin, elle, s'appliquerait à l'ensemble des transactions financières, et pas seulement aux transactions sur les actions. Elle toucherait en particulier les transactions sur les devises, sur les marchés des changes, et sur les produits dérivés.

    C'est à cette condition qu'elle pourrait avoir un impact régulateur et diminuer vraiment le volume de la spéculation.
    C'est un peu comme le bouclier fiscal : c'était une bonne chose de le supprimer, ce serait une bonne chose de rétablir l'impôt de Bourse, mais ça n'a rien à voir avec une taxe Tobin.
     
    (…)
  • Taxe Tobin en Europe : une avancée qui vient trop tard

    Le président de la Commission européenne, M. Barroso, va proposer au Conseil européen un projet de directive sur la taxation des transactions financières. Il y a dix ans nous aurions crié victoire. Mais aujourd'hui c'est trop peu, trop tard.

    Que tous les responsables politiques européens reprennent une proposition que nous portons depuis douze ans représente une victoire des idées d'Attac. Les modalités proposées par la Commission rejoignent sur plusieurs points nos propositions : un taux de 0,1 %, appliqué à toutes les transactions impliquant des opérateurs financiers européens, aurait indiscutablement un effet régulateur important en dissuadant les opérations les plus spéculatives, notamment le "trading à haute fréquence". La prise en compte des transactions sur les produits dérivés, à leur valeur nominale, serait également une avancée importante, même si on peut regretter que le taux proposé ne soit alors que de 0,01 %. L'ampleur de la proposition est malheureusement limitée par l'exclusion de la taxation des transactions sur le marché des changes (entre l'euro et d'autres devises ) car ce marché pèse 4 000 milliards de dollars par jour, soit près de la moitié des transactions financières dans le monde.

    Des interrogations majeures subsistent sur l'utilisation des fonds récoltés. Si le produit n'est utilisé que pour combler les déficits et renflouer une nouvelle fois les banques sans contrepartie, l'efficacité sera nulle. Les dizaines de milliards d'euros que la taxe pourrait rapporter doivent alimenter des fonds européens et mondiaux pour financer la lutte contre la pauvreté en Europe et ailleurs, contre les épidémies et le réchauffement climatique, et pour amorcer la transition écologique.

    Nous ne sommes pas dupes : les dirigeants européens ne se sont résolus à nous donne raison que pour mieux justifier auprès des opinions publiques le passage du rouleau compresseur de l'austérité, avec son lot de politiques injustes. Une offensive d'une virulence inédite se déroule en ce moment en Europe contre l'Etat social alors que les dettes publiques et la crise de l'euro, loin de résulter d'un excès de dépenses, proviennent de la crise financière et des cadeaux fiscaux consentis depuis vingt ans aux privilégiés. La taxe sur les transactions financières ne suffira aucunement à redistribuer les richesses à la hauteur des nécessités actuelles. Il n'est pas non plus anodin qu'elle soit annoncée au moment où se profile une recapitalisation des banques européennes par les fonds publics : il s'agit d'éviter une révolte contre ce nouveau sauvetage des banques, en donnant l'impression que la finance est elle aussi mise à contribution.

    Cette taxe – et seulement en 2014 – c'est trop peu, trop tard. Trop peu car le désarmement des marchés financiers, nous l'avons toujours dit, ne peut se limiter à une taxe : il faut aussi des réglementations énergiques (démantèlement des banques "trop grosses pour faire faillite", contrôle de flux des capitaux, interdictions des transactions de gré à gré, stricte limitation des marchés de produits dérivés, surtout sur les marchés de produits alimentaires…). Trop tard, car la crise financière provoquée par trente années de laxisme prend aujourd'hui des dimensions dramatiques.

    Des solutions radicales deviennent désormais incontournables, comme la socialisation du secteur bancaire et sa mise sous contrôle de la société ; l'audit des dettes publiques et la répudiation de leur part illégitime ; la réforme de la Banque centrale européenne pour qu'elle puisse financer directement les Etats… Nous avions raison sur la taxe Tobin ; souhaitons qu'il ne faille pas encore dix ans et une crise cataclysmique pour que nos propositions actuelles soient elles aussi prises au sérieux.

    Publié dans Le Monde du 06 janvier 2012