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  • Trois leçons rapides de « Flopenhague »

    Un accord qui n’en est pas un. Deux ans de négociations pour aboutir sur une déclaration très en retrait par rapport aux objectifs fixés à Bali en décembre 2007 par tous les pays. On nous avait annoncé Hopenhague – à partir du mot « hope » signifiant « espoir » – nous avons eu Flopenhague. Il est temps de tirer quelques premiers enseignements. 

    1- La réal-géopolitique l’emporte sur les bonnes intentions climatiques.

    Avant l’ouverture de la COP-15, nous avions pointé ici les risques de remise en cause du cadre onusien multilatéral de négociations. Annabella Rosemberg en avait fait autant dans son premier post sur ce blog.

    Au final ce sont bien les 27 pays composant le Forum des Économies Majeures qui ont peu ou prou négocié et conclu un texte qu’ils ont cherché à imposer aux gouvernements des autres pays, avec beaucoup d’arrogance semble-t-il. Si le résultat est mitigé, puisque les parties n’ont fait que « prendre note » du texte proposé, le détournement des processus de négociations officielles onusiennes est bien réel avec la création d’un circuit parallèle. Comme l’ont dit certains observateurs, « on a commencé avec l’ONU et on a fini avec le G20 », peut-être de manière irréversible.

    Depuis quelques jours d’ailleurs, Nicolas Sarkozy et son gouvernement ne cessent de tacler le « système onusien » qui serait « à bout de souffle » et d’un « autre temps », ne laissant pas suffisamment de place « aux grands émergents ». Des pays comme Tuvalu ou la Bolivie crient au scandale anti-démocratique en pointant une « forfaiture » insupportable. Il est clair aujourd’hui que la diplomatie climatique d’Obama ou Sarkozy avait peu à voir avec les enjeux climatiques mais beaucoup avec les nouveaux équilibres géopolitiques mondiaux en train de se construire. Ainsi se comprennent les velléités d’isoler la Chine de ses alliés, tels les pays africains ou l’Inde. Si l’on ne sait pas encore de quoi demain sera fait, il ne semble pas qu’Obama et Sarkozy sortent renforcés sur la scène internationale. 

    Au contraire, à en croire les journaux danois de ce samedi, la Cop-15 a révélé que « le vieux modèle de la Banque mondiale - où le pouvoir est partagé entre Washington et Bruxelles - ne fonctionne plus » et que la Chine a « imposé son statut de superpuissance » sur la scène diplomatique. Ne pas en tenir compte et considérer que la science et la justesse des propositions suffiraient à sauver le climat seraient une erreur. La réal-géopolitique s’est invitée dans les négociations climatiques. Il y aura bien un avant et un après Copenhague. Mais peut-être pas celui que les ONG espéraient.

    2- Le lobbying climatique a atteint ses limites

    Depuis plus de 20 ans, les ONG environnementales n’ont cessé d’alerter les opinions publiques et ont finalement obtenu une véritable prise de conscience des problèmes climatiques et environnementaux produits par nos modes de consommation et de production. C’est décisif, nous ne pouvons que les remercier de ce travail. Ces derniers mois, elles n’ont pas ménagé leurs efforts. Des dizaines de rapports et de propositions, un nombre incalculable de rencontres avec les gouvernements ou négociateurs officiels, des campagnes d’interpellation publique pour mobiliser les populations, etc… Tout y est passé.

    En vain. Il est bien-entendu possible de se lamenter de l’inaction des puissants, de leur aveuglement et de leurs mensonges. Depuis samedi les réactions en ce sens se multiplient. Mais le Flop de Copenhague doit aussi interroger les stratégies des uns et des autres. Il montre en creux les limites des actions de plaidoyer et de lobbying. Preuve semble faite que la maitrise de l’expertise technique et l’interpellation des opinions publiques par opérations de communication ou mass médias ne suffisent pas à obtenir des décisions à la hauteur des enjeux. Se retrouver en tête-à-tête avec les décideurs sans disposer du rapport de force social nécessaire pour imposer ses solutions revient à espérer que seul l’intérêt général dicte les décideurs de ce monde.

    C’est peu probable dans le cas général, ça l’est encore moins lorsque la real-géopolitique s’invite au cœur des négociations. Et dans la mascarade que nous venons de vivre, les ONG qui s’étaient concentrées sur le lobbying interne semble à la fois démunies et abattues. Entendons-nous. Le propos n’est pas de conclure que le lobbying et la communication grand public sont inutiles. Mais qu’ils ne peuvent être fructueux que pensés dans la construction d’un rapport de force social ne transigeant pas avec des véritables objectifs de transformation du monde dans lequel nous vivons.

    3- L’arrivée massive des mouvements sociaux dans la bataille climatique

    Finalement, si le sommet de Copenhague restera dans les mémoires, c’est parce qu’il marque l’arrivée massive des mouvements sociaux dans la bataille climatique. C’est décisif. Il y aura aussi un avant et un après Copenhague 2009 de ce point de vue. L’avenir nous dira si, 10 ans après Seattle, la « convergence inédite entre mouvements sociaux, mouvements écologistes, mouvements de solidarité internationale » observée à Copenhague fait réellement « naître un nouvel espoir et constitue un tournant du mouvement altermondialiste », comme le dit Attac. A l’image de Seattle, des tactiques et pratiques militantes très diverses ont pu se côtoyer, se mêler et se renforcer mutuellement. A l’immense manifestation du 12 décembre réunissant 100.000 personnes, se sont ajoutées l’excellente déclaration « Changeons le Système ! Pas le Climat ! » et les 300 initiatives (débats, présentation de rapports, expositions, théâtre, concerts…) du KlimaForum, portées par plus de 250 organisations.

    Il faut y rajouter les multiples actions de rue qui ont maintenu la pression et l’expression citoyenne durant les deux semaines. Et notamment l’initiative du 16 décembre, « Reclaim Power », portée par les coalitions Climate Justice Now!et Climate Justice Action, mêlant une manifestation et des actions visant à se rapprocher au plus près du Bella Center et des interventions à l’intérieur même des négociations (vidéo ici et ici) pour bousculer les négociations officielles en créant un «Forum des Peuples» et faire entendre les propositions de celles et ceux qui sont ne sont jamais écouté-e-s. Avec les tensions et divisions entre pays et blocs de pays au sein de négociations, tous les ingrédients de Seattle étaient donc réunis. Avec une différence notable. Il y a dix ans, il s’agissait de bloquer les négociations de l’OMC visant à libéraliser des pans entiers de services publics et d’activités essentielles aux populations.

    A Copenhague, les coalitions d’ONG et de mouvements sociaux exigeaient l’obtention d’un accord contraignant, juste et à la hauteur des enjeux. Le climat étant le premier sujet politique planétaire à solidarité obligatoire, l’obtention d’un tel accord, dans un cadre onusien multilatéral, est une absolue nécessité. Après Copenhague, il devient évident que seul un rapport de force mondial construit par des mobilisations citoyennes et sociales sans précédent peut l’autoriser. Il faut s’y mettre dès aujourd’hui. En ancrant nos revendications globales dans des mobilisations et alternatives locales et nationales. Sans transiger sur le fond.

    Par Maxime Combes (Aitec-IPAM et Urgence Climatique Justice Sociale)

  • Pour une politique ouverte de l’immigration

    Immigration_couv.jpgPour une politique ouverte de l’immigration, dernier ouvrage réalisé par Attac France, disponible dans toutes les bonnes librairies.

    Les migrations constituent un phénomène historique permanent, elles sont même consubstantielles à l’histoire de l’humanité. Pourtant, les États de l’Union européenne et l’Union elle-même pratiquent une politique d’isolement, entendant n’admettre d’immigrants, au compte-gouttes, que sur le seul critère de leur « intérêt économique » pour le pays d’accueil.

    Cette politique n’est pas nouvelle. Elle a toujours échoué. Elle a comme première conséquence de rendre illégitime la présence de populations issues de l’immigration, installées parfois depuis longtemps, et ne fait que renforcer les discriminations de fait ou de droit dont elles sont victimes. Ce livre rappelle que l’immigration, loin d’être un danger, peut et doit profiter aux uns et aux autres. Il démonte un à un les arguments invoqués pour tenter de justifier l’Europe forteresse et le repli sur soi, et met en lumière l’absurdité de l’immigration prétendument choisie.
    Il faut, au contraire, envisager une politique d’immigration ouverte, apaisée, accompagnée d’une citoyenneté de résidence. Ce qui suppose des décisions politiques courageuses, octroyant aux étrangers un certain nombre de droits attachés à cette citoyenneté, par exemple le droit de vote et d’éligibilité. La liberté de circulation et d’installation des personnes fait partie des droits fondamentaux de l’humanité, il est grand temps de s’en souvenir. D’autant que, comme le disait le président bolivien Evo Morales : « Les problèmes de cohésion sociale dont souffre l’Europe ne sont pas la faute des migrants, mais le résultat du modèle de développement imposé par le Nord, qui détruit la planète et démembre les sociétés des hommes. »

    Pour une politique ouverte de l’immigration
    Attac, Groupe de travail « Migrations et mondialisation » du Conseil scientifique d’Attac, Éditions Syllepse, Paris, octobre 2009, 7€.

     

  • OMC : Mr Lamy se félicite de l'accord…

    rubon1.jpg… mettant fin au vieux différend sur les bananes.

    Une nouvelle relativement importante dans le monde du commerce international : l'OMC annonce qu'un accord a été trouvé sur le contentieux de la banane qui opposait depuis longtemps l'UE, les EU et les pays d'Amérique latine.

    Suite à la plainte des EU, de l'Equateur, du Guatemala, du Honduras et du Mexique deux ans auparavent, l'UE avait promis en septembre 1997 de passer d'un régime restrictif de quotas à un tarif douanier unique pour la banane au plus tard en javier 2006, alors que les EU s'engageaient de leur côté à mettre fin à des sanctions contre les produits européens (191 millions de $) en 2001. En avril 2008, les juges de l'ORD ont  reconnu, à la demande de l'Equateur, que l'UE n'avait pas tenu ses promesses. Quelques mois plus tard, un jugement prononcé à la demande des EU allait dans le même sens. Pour l'UE, il est question de protéger "ses" producteurs de banances (d'outremer, région qualifiée "d'ultra-périphérique").

    Par l'accord passé le 15 décembre 2009, l'UE abaissera les droits de douanes sur les bananes en provenance de l'Amérique latine de 176 € la tonne à 114 €. Cela veut dire que le prix de la banane baissera de 11 % dans l'UE et que les producteurs de bananes d'Amérique du Sud verront leurs exportations monter d'environ 17 % selon certaines sources, alors que les producteurs d'Afrique et des Caraïbes verront leurs exportations vers l'UE baisser de 14 %. Dans le même sens, les firmes américaines sont également concernées, comme les consommateurs américains. L'UE a mis 200 millions d'euros dans le Fonds de développement pour une compensation en faveur des pays ACP.

    Pascal Lamy se réjouit car ce problème non-réglé à longtemps empêché un accord global sur le commerce agricole.

    Frédéric Viale, commission OMC/AGCS d'Attac France.

  • "La décennie zéro" de l'Amérique pour Paul Krugman

    Paul Krugman, prix Nobel d'économie, a une manière assez singulière de souhaiter la nouvelle année. Pour sa dernière chronique parue dans le New York Times du 27 décembre, l'économiste dresse un constat pour le moins affligeant de la décennie 1999-2009 qui s'achève."Ce fut une période où rien de bon n'est arrivé", écrit l'économiste. "La décennie zéro", résume-t-il, qu'il ferait bon oublier. Et vite.

    Au cours de ces dix dernières années, les ménages américains n'ont en effet, selon lui, rien gagné. Ni en termes d'emplois ni en termes de richesses.

    "Certes, reconnaît M. Krugman, le nombre d'emplois en décembre 2009 sera légèrement supérieur au chiffre de 1999, mais seulement très légèrement." Quant aux revenus des ménages, en dépit du "Bush Boom" de 2007, sous la présidence de George W. Bush, M. Krugman calcule que le revenu médian ajusté de l'inflation est inférieur à ce qu'il était dix ans plus tôt. Si les ménages ont pu consommer davantage, ce n'est qu'en s'endettant davantage."Et vous savez ce qui est arrivé ensuite", souligne l'économiste.

    Ceux qui ont acheté leur logement au début de la décennie ne sont pas, non plus, devenus plus riches : le prix des maisons est le même qu'en 1999. Quant à ceux qui sont devenus propriétaires juste avant l'éclatement de la bulle,"je ressens votre douleur", compatit M. Krugman. Enfin, les épargnants qui ont placé leur argent en Bourse, notamment pour leur retraite, ne sont guère mieux lotis : le Dow Jones est aujourd'hui autour de 10 540 points, peu ou prou son niveau de 1999.

    Mais le pire est sans doute le constat politique de ces dix années. Pour l'économiste, ni les républicains ni les démocrates n'ont su remettre en cause les pratiques qui ont mené à ce gâchis."Au cours de cette décennie, on n'a rien accompli et rien appris", conclut-il, avant de souhaiter "une bonne année".

    Le Monde, 30/12/09

     

  • Le Pentagone plombé par ses sous-traitants... vive les fonctionnaires !

    Comment réduire les coûts du Pentagone ? Grave question, à laquelle le Congrès vient de trouver une réponse : en remplaçant ses sous-traitants privés par des fonctionnaires, l'Etat économisera 44 000 dollars par poste ! Une pierre dans le jardin du l'ultralibéralisme. Ça vaut bien un Nobel de l'économie.

    Le département de la Défense américain estime qu'il pourra économiser 44.000 dollars tous les ans pour chaque poste de sous-traitant remplacé par un fonctionnaire, selon un rapport du Sénat détaillé par le Washington Post. D'où le vote, samedi au Congrès, d'une ligne de crédit de 5 milliards de dollars pour embaucher de nouveaux agents gouvernementaux amenés à remplacer ces onéreux contractants, aux Etats-Unis comme à l'étranger. L'histoire ne dit pas combien d'employés seront embauchés, pas plus qu'elle ne précise le nombre de contractuels débauchés.

    La faillite de la privatisation de l'armée

    A l'occasion de la guerre en Irak, l'administration Bush a largement favorisé le recours au privé. À l'époque, les responsables de la Défense faisaient valoir que le Pentagone avait un besoin urgent et temporaire de personnel ; la guerre était encore considérée comme une opération devant se solder par un triomphe rapide. Le fait que les décès de mercenaires tués dans les zones de combat ne sont pas comptabilisés officiellement n'était pas pour déplaire non plus. Et le privé étant soumis à la sacro-sainte règle de libre concurrence, l'objectif était également d'économiser de l'argent. Las, l'an dernier, le Congrès a indiqué que le gouvernement devait s'acquitter de la modique somme annuelle de 250 000 dollars pour chaque employé contractuel engagé, là où il n'en dépensait que 200 000 pour un fonctionnaire du ministère.

    Plus de mercenaires que de soldats de l'armée

    Le 7 juin dernier, le rapport d'une commission bipartite révélait que près de 250 000 contractuels privés participent aux guerres d'Afghanistan et d'Irak. En Irak, il y a quasiment autant de soldats privés (133 000) que de militaires gouvernementaux. Quant à l'Afghanistan, ils sont plus nombreux (68 000) ! Sans compter le personnel non combattant. Et ça ne risque pas de s'arranger, car si Obama a décidé d'envoyer 30 000 fantassins supplémentaires en Afghanistan, les sous-traitants devraient voir leur nombre s'accroitre de 56 000.