CETA : après le vote de Strasbourg, faire échec à la ratification nationale
Le Parlement européen a adopté le traité de libre-échange conclu entre l’UE et le Canada (ou CETA) ce midi. 90 % de ce traité entrera en application provisoire à partir du 1er mars, sans approbation des Parlements des États membres.
La phase des ratifications nationales commence donc à partir d’aujourd’hui, et ce sont 38 parlements nationaux ou régionaux qui vont devoir se prononcer sur le traité pour qu’il soit définitivement valide dans l’ordre juridique européen.
Pour Thomas Borrell, des Amis de la Terre, « Malgré la mobilisation croissante en Europe et au Canada depuis des mois, et le déplacement de centaines de manifestants européens à Strasbourg pour appeler les eurodéputés à ne pas soutenir par principe un accord dont la dangerosité est largement démontrée, les membres du Parlement ont cédé aux arguments des lobbies : c’est une décision lourde de conséquences, mais qui n’affaiblit en rien notre détermination à faire échec à ce traité ».
Amélie Canonne, de l’AITEC déplore : « Il est frappant de constater que la DG Commerce et les promoteurs du traité le défendent depuis des semaines avec un seul argument, tant ses vertus et avantages intrinsèques sont inexistants : la nécessité prétendue d’approfondir le libre-échange pour faire échec à l’isolationnisme de Trump. Mais c’est tout l’inverse qui va se produire ! L’avènement du CETA va encore aggraver la défiance populaire à l’égard de l’Europe et de ses dirigeants, et alimenter l’entreprise des populistes d’extrême-droite, plus soucieux d’instrumentaliser la peur que d’organiser une transition juste, durable et solidaire. »
Murielle Guilbert de l’Union syndicale Solidaires explique : « Avec l’application du CETA, 92% des produits agricoles canadiens entreront sans aucun droit de douane sur le marché européen, la "coopération réglementaire" qui vise à niveler les normes sanitaires, sociales ou environnementales par le bas va s’organiser, les investissements des entreprises européennes dans les sables bitumineux canadiens vont augmenter. Les quelques 35500 communes françaises devront appliquer les procédures du CETA dans le domaine des marchés publics, de l’ouverture de leurs services locaux ou encore de la réglementation des activités des entreprises canadiennes sur leur sol. Ce sont des évolutions silencieuses mais très lourdes dans leurs implications sur le terrain ».
« On ne peut pas accepter le CETA, un accord qui menace les réglementations protégeant l’environnement, les droits sociaux ou encore l’alimentation (OGM, pesticides, etc…), ne garantit pas le principe de précaution, et en plus est incompatible avec la Constitution française », insiste Karine Jacquemart, de foodwatch France.
Andrée Desvaux du Collectif Roosevelt précise : « D’une part le CETA aggravera encore la crise agricole, les problèmes de santé publique et la destruction de la planète, et d’autre part il inaugure une nouvelle génération de traités commerciaux qui déposséderont les gouvernements et les parlements de leur capacité d’agir et de réglementer dans l’intérêt général. Car la Commission, soutenue par la plupart des États membres, entend multiplier ce type d’accords très larges, comprenant des dispositions d’arbitrage, de coopération réglementaire ou encore de libéralisation des services par voie de liste négative, ou d’ouverture de nos marchés publics à davantage d’entreprises étrangères. »
Jean Michel Coulomb d’Attac commente, « Nous n’avons aucune idée de la date de ratification prévue en France, mais nos organisations seront mobilisées pour faire en sorte que la France ne ratifie pas le traité. Une résolution de l’Assemblée nationale votée la semaine dernière appelle à une consultation publique authentique avant cette ratification, nous espérons, quelle que soit la majorité politique, qu’elle se soumettra à un minimum de règles démocratiques, et qu’elle organisera le débat authentique dont nous avons besoin, en impliquant véritablement l’opinion publique. »
Les traités européens ne fixent aucun calendrier contraignant, et les conséquences d’une éventuelle ratification négative sont incertaines car le droit européen est muet sur ce point.
« Au delà du CETA lui-même, c’est l’avenir de la politique commerciale de l’UE qui se pose à court terme. La Commission veut-elle persister dans une vision qui fait primer la concurrence sur les droits les plus fondamentaux, et qui détruit à la fois nos sociétés et notre planète, ou entend-elle les millions de personnes en Europe, et leurs homologues partout dans le monde, qui, bien qu’attachés à la circulation des idées et des personnes, demandent que la mondialisation économique et commerciale soit régulée et que la planète comme les hommes et les femmes soient protégés. Le CETA a lancé le débat, nous allons faire en sorte que les propositions de nos associations, mouvements ou syndicats soient entendues dans les mois à venir », conclut Michel Dubromel, vice-Président de France Nature Environnement.
Décidément, les gouvernements et la Commission européenne ne comprennent et n’apprennent rien : pour essayer de court-circuiter tout débat suite à la vaillante résistance du parlement wallon, ils ont décidé de ratifier à la va-vite, par une procédure écrite inédite (!), les textes du CETA.
LES DISPENSAIRES AUTOGÉRÉS GRECS RÉSISTANCES ET LUTTES POUR LE DROIT À LA SANTÉ
En Grèce se joue aujourd’hui une bataille politique cruciale pour l’avenir de l’Europe. Depuis la victoire électorale de Syriza le 25 janvier 2015 a lieu une tentative inédite pour rompre avec la politique économique néolibérale de l’Union européenne et sortir du carcan mortifère de l’austérité. Les négociations avec l’Eurogroupe et le bras de fer avec la Troïka ont conduit cet été à deux événements politique majeurs : la victoire du non au référendum en Grèce, puis la signature par le gouvernement grec, sous la pression économique et politique des institutions européennes, d’un troisième Mémorandum. Les réussites et les échecs de cette expérience grecque, ses enseignements pour la gauche de transformation sociale, les nouvelles perspectives internationalistes qu’elles rendent possibles, sont désormais en discussion dans tous les pays européens et particulièrement en France.